Le contentieux des PLANS LOCAUX D’URBANISME encadré par le principe de sécurité juridique

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L’abandon partiel de la jurisprudence Commune de Saint-Lunaire

Le Conseil d’Etat, par une décision n° 388902   du 5 mai 2017, Commune de Saint-Bon-Tarentaise,  indique d’une part, que la délibération qui prescrit l’élaboration ou la révision d’un PLU fait grief et qu’elle est directement susceptible de recours, d’autre part, que cette délibération doit prévoir deux volets, à savoir objectifs poursuivis par l’administration et les modalités de la concertation. A défaut, la délibération susvisée est illégale. Par cette décision, le Conseil d’Etat innove en affirmant que cette illégalité ne peut être utilement invoquée à l’appui d’un recours contre la délibération qui approuve le PLU. Il rompt ainsi partiellement avec la jurisprudence antérieure.

 

  • La réaffirmation des obligations pesant sur la délibération prescrivant l’adoption ou la révision du plan local d’urbanisme (PLU)

L’élaboration ou la révision d’un plan local d’urbanisme constitue un travail de longue haleine qui débute par la délibération qui prescrit l’élaboration ou la révision du document et se clôt par la délibération qui l’approuve.

En vertu des articles L. 103-2 et L. 103-3 du Code de l’urbanisme, anciennement article L. 300-2 du Code de l’urbanisme, la délibération qui prescrit l’adoption ou la révision d’un plan local de l’urbanisme (PLU) doit porter :

  • d’une part, sur les objectifs poursuivis par l’administration
  • d’autre part, sur les modalités de la concertation

Cette exigence a été constamment réaffirmée par une jurisprudence constante[1]. Le juge administratif vérifiant scrupuleusement que la délibération susvisée portait bien :

  • d’une part, sur les objectifs, au moins dans leurs grandes lignes, poursuivis par la commune projetant d’élaborer ou de réviser un document d’urbanisme;
  • d’autre part, sur les modalités de la concertation avec les habitants et les associations locales.

Dans sa décision Commune de Saint-Bon-Tarentaise, du 5 mai 2017, n° 388902, le Conseil d’Etat indique très clairement que la délibération qui prescrit l’élaboration ou la révision d’un PLU se doit de prévoir les deux volets susvisés. Ce faisant, le Conseil d’Etat s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence Commune de Saint-Lunaire.

 

  • L’illégalité de la délibération prescrivant l’adoption ou la révision d’un PLU ne peut plus être utilement invoqué contre la délibération approuvant le PLU

Dans la décision objet du présent commentaire, le Conseil d’Etat affirme que la délibération qui prescrit l’élaboration ou la révision d’un PLU est un acte faisant grief et susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.

Il demeure possible de faire censurer une délibération qui prescrit l’élaboration d’un PLU si celle-ci n’a pas porté sur les objectifs poursuivis ou si elle n’a pas prévu les modalités de la concertation. Cependant, pour faire valoir cette irrégularité, il conviendra d’effectuer un recours pour excès de pouvoir directement dirigé contre cette délibération.

En revanche, par cette récente jurisprudence, le Conseil d’Etat exclut désormais que l’illégalité de la délibération prescrivant l’adoption ou la révision du plan local d’urbanisme (PLU) puisse être utilement invoquée contre la délibération approuvant le PLU.

En d’autres termes, une délibération prescrivant l’adoption d’un PLU qui ne ferait pas figurer les objectifs poursuivis par la commune ou les modalités de la concertation est clairement illégale et, pourrait de ce fait être censurée si elle est directement contestée. En revanche, ces illégalités ne pourront être utilement invoquées à l’appui d’un recours contre la délibération approuvant le PLU.

Par cette jurisprudence, le Conseil d’Etat marque une nouvelle fois son attachement au principe de sécurité juridique.

par Yohan VIAUD, Avocat Associé et Caroline BARDOUL, Avocat

[1] CE 10 février 2010, Commune de Saint-Lunaire, n° 327149 ; CE 4 mars 2016, Commune de Martigues, n° 384795.